samedi 14 février 2009

Le Roi des ermites

Le but de l’ermite n’est ni social ni caritatif. Volontairement, il se place en dehors de toute aide, de tout secours horizontal, y compris ecclésial. L’Église horizontale n’a pas toujours été et elle n’est pas partout. Même en son sein, il peut se trouver des fidèles privés de ses aides et secours en raison de leur handicap physique ou psychique, partiel ou total. Handicap moral aussi, comme le divorce. Sourds, muets, aveugles, culs-de-jatte et divorcés sont tous à mettre dans le même panier par rapport à l’accès aux sacrements, moyens déclarés «indispensables» par une théologie obtuse. L’ermite s’est mis volontairement hors du camp et se béatifie sans aucune aide, à l’image du Christ sur la croix, le roi des ermites.


L’état d’ermite vient donc au secours de tous ceux qui n’ont plus droit aux aides instaurées par l’institution. C’est bien de cet état qu’il s’agit, au premier rang des Béatitudes, dans le Sermon sur la montagne : «Bienheureux les pauvres...» Ce n’est pas la peine, de traduction en traduction de la Bible, de tergiverser pour déféquer une litanie de définitions toutes plus malodorantes les unes que les autres.


Bienheureux les pauvres en esprit parce que le royaume des cieux leur appartient. «Royaume de cieux» signifie «béatitude sans condition» ou nirvana sous d’autres latitudes. Et «pauvreté d’esprit» : l’état de l’esprit saint qui se réjouit du manque de tout. Car ceux qui se plaignent de ne pas pouvoir assister à la messe, de ne pas pouvoir communier, de ne plus ceci ou cela, et à qui les prêtres répondent : «Dieu voit votre souffrance et s’en réjouit», tous ceux-là sont encore des milliardaires mendiants qui se morfondent de manquer de quelque chose ou qu’on leur manque d’égard [sic], une rétention incompatible avec la béatitude sans condition, autrement dit le royaume des cieux.


© Frère Antoine, « Au Cœur de la grotte ».

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